Niveau(x) | 2nde |
---|---|
Dispositif pédagogique | AP |
Durée | 4 h. |
Notion(s) | Hypertexte |
---|---|
Savoirs pratiques |
|
Savoirs théoriques |
|
Savoirs normatifs |
|
Évaluation | sommative |
Scénario | La production guidée d'un hypertexte traitant de la notion même d'hypertexte amène à une sensibilisation des élèves sur la navigation hypertextuelle et le lien hypertexte. |
---|---|
Méthode(s) pédagogique(s) | active : observation |
Descriptif | Séance 1 : Émergence des représentations
Séance 2 : Recherche d'information sur la notion de lien hypertextuel
Séance 3 : Écriture collaborative
|
Démarche | inductive |
---|---|
Tâche | Produire un hypertexte sur l'histoire et la définition de l'hypertexte incluant au moins cinq liens hypertextuels motivés. |
Matériau(x) | Pages web |
Production | Texte collaboratif pourvu d'une syntaxe markdown sur un pad pouvant devenir un hypertexte via un CMS |
Fiche(s) élève(s) |
Si la notion d'hypertexte est relativement récente parce que liée à l'émergence du numérique, elle plonge toutefois ses racines dans l'histoire du document, depuis la glose déposée dans la marge du codex jusqu'aux dispositifs de référencement intra- (sommaire, index, renvois de notes) et extra-documentaires (bibliographie) des livres actuels en passant par la Roue à livres d'Agostino Ramelli en 1588, par l'encyclopédie Diderot et D’Alembert au XVIII° siècle et par le Memex de Vanevar Bush (1945).
L'intérêt majeur de cette séquence est donc, non seulement de reconnaître que la notion d'hypertexte, au-delà de sa dimension digitale, est une notion info-documentaire importante dont la pratique est aujourd'hui constitutive de notre présence sur Internet, mais également d'en proposer une didactisation dans le secondaire dans le but d'en faire un savoir scolaire utile à la compréhension de notre environnement info-documentaire.
Sous cet angle, les savoirs scolaires constitués de l'hypertexte devrait permettre aux élèves de prendre conscience de :
Ainsi, au travers d'une réflexion guidée sur l'hypertexte et le lien hypertextuel qui en constitue l'entrée, l'élève peut être progressivement conduit à ré-examiner son rapport à la lecture et à l'écriture, au texte, au document, à l'information, aux médiations techniques du savoir et de l'apprentissage, aux médias, ainsi qu'aux industries qui exploitent et conditionnent ces derniers. Pour toutes ces raisons, l'approche didactique de l'hypertexte est une clé essentielle de l'entrée de l'élève dans la culture de l'information.
Partir des pratiques usuelles des élèves pour les aider à construire des savoirs élaborés est chose facile lorsqu'il s'agit d'un objet aussi commun et attractif que l'hypertexte. C'est le chemin qu'emprunte ce scénario pédagogique.
Partir de ce que savent les élèves à partir d'une verbalisation spontanée permet de faire émerger des représentations à partir desquelles appuyer une question problème qui donnera du sens à l'activité prévue. Quand elle n'est pas structurée par une évaluation diagnostique et/ou appuyée sur un document (texte ou vidéo), cette verbalisation peut ne concerner que quelques élèves volontaires et/ou en rester à des contenus superficiels. Ici, elle s'appuie avec profit sur une activité (n°1) concrète qui implique directement tous les élèves : invités à produire un court (hyper)texte quasiment libre où leur centre d'intérêt ou leur imagination sont conviés, la classe va pouvoir rapidement disposer d'un matériau brut et facilement disponible qui va lui permettre d'exprimer, par le faire et par le dire, les représentations qu'elle se fait de l'usage des liens hypertextuels (séance n°1).
Au cours de cette phase d'observation et d'analyse du corpus réalisé, les matériaux sont alors classés et catégorisés, favorisant un processus cognitif menant de la pratique à l'abstraction. Cette phase de structuration conclut en quelque sorte l'apprentissage. La suite du cours consiste en l'application de ce qui vient d'être mis en évidence (activités n°2 et 3). Les élèves sont invités, au travers d'une contrainte (« Je leur demande toujours au moins 5 hyperliens, mais dont la combinaison, en terme de média et d'intention, ne soit jamais la même »), à réinvestir les acquis du cours concernant la typologie des hyperliens. Un contrat didactique est en quelque sorte conclu à partir de cette typologie construite avec les élèves, laquelle va pouvoir légitimer et donner du sens aux tâches d'application qui consistent à mieux « penser » le choix des liens hypertextuels.
L'enseignant a utilisé une méthode active, de type observationnel, qui suit le schéma suivant :
La fiche pédagogique fait une distinction entre « objectifs notionnels » et « objectifs d'apprentissage ». Selon nous, tous relèvent d'objectifs d'apprentissage, les premiers se rapportant à des savoirs théoriques (T2 : visée d'intelligibilité) et les seconds à des savoirs pratiques (T1 : visée d'efficacité). Nous nous concentrons sur les premiers, la discrimination des formes de l'information et des fonctions de l'hyperlien d'une part, la connaissance de histoire d'un objet technique d'autre part.
Une première catégorisation est réalisée par les élèves à partir de leurs pratiques (activité n°1). Nous suivons donc ces élèves qui effectuent ces regroupements de manière empirique. Si les résultats produits ne satisfont pas l'enseignant, ils sont cependant utilisés par la suite dans l'activité n°2, ce que l'on interprète comme une mise à l'épreuve de ces outils. Mais la fiche n'indique pas ce qu'il advient finalement de ces catégories et nous donne l'impression que la piste est abandonnée au profit de l'activité d'écriture collaborative (activité n°3) et de l'objectif de connaissance sur l'histoire de l'objet technique. Nous suggérons ainsi que, pour avancer dans cet apprentissage, un retour sur ces premières intuitions de typologies soit fait à l'occasion d'une mise en commun qui assurerait une confrontation critique. A la suite de quoi, une phase de structuration guidée par l'enseignant permettrait de s'approprier des repères plus stables s'agissant des formes de l'information et des fonctions des liens.
L'évaluation indiquée sur la fiche s'appuie sur la production des élèves (l'hypertexte écrit collaborativement) et sur les traces que ceux-ci ont laissées sur le chat accompagnant le pad. Du point de vue des contenus, l'évaluation est centrée sur les liens hypertextuels et sur les nécessaires arbitrages qui les ont précédés. Les critères de cette évaluation et ce qui était attendu par l'enseignant, aussi bien à propos des connaissances théoriques et historiques qu'à propos du choix des liens hypertextuels, ne sont pas indiqués. S'agissant de ces choix, nous pouvons imaginer qu'une verbalisation structurée de ce que représente un lien hypertextuel (définition, forme de l'information cible, fonctions, caractéristiques) pourrait par exemple constituer un support d'évaluation concret et individualisé.
A partir de la définition simple du lien hypertexte donnée par Olivier Ertzscheid (2002), nous proposons les niveaux de formulation suivants :
NB : Ce texte peut être verbal ou iconique.
Niveau 2 :
Un lien hypertexte relie deux informations entre elles à partir de deux unités de texte.
Niveau 3 :
Un lien hypertexte relie deux informations entre elles à partir de deux unités de texte qui peuvent appartenir à deux documents différents ou à deux parties d'un même document.
NB : Selon le contexte didactique, on peut utiliser le terme « page web » à la place de « document ».
NB : Chaque nœud correspond à une information délimitée par une unité de texte.
L'auteur, enseignant en lycée, a proposé cette séance à ses élèves de 2nde. Pour autant, il estime qu'elle pourrait être expérimentée au collège. Nous le rejoignons pour penser qu'un questionnement sur le lien hypertextuel à partir d'une analyse de la pratique documentaire peut être initié dès le niveau 6ème. Il resterait alors à décliner ces approches de manière progressive selon l'entrée dans la complexité que cette notion autorise (voir supra Les niveaux de formulation).
Afin de prolonger la réflexion didactique engagée ici et de circonscrire un premier cercle des contenus d'apprentissage info-documentaires à mettre en œuvre selon les niveaux curriculaires, nous proposons les quelques pistes suivantes :
intéresser les élèves au lien hypertextuel lui-même et à son « éco-système sémantique » : où apparaît-il et pourquoi ? Constitué de « noeuds » reliés par des « liens » qui traversent le texte à l'intérieur d'un document ou les documents eux-mêmes (d'une page intra- ou inter- site à une autre) telles des portes inter-documentaires, se demander comment se choisit l'ancrage sémantique des nœuds : qu'est-ce qui motive telle ou telle unité textuelle verbale ou iconique), par exemple, pour être le siège d'un lien hypertextuel ? Ces questions peuvent être étudiées à partir d'une observation-expérimentation aussi bien que d'une réalisation. Le but est de considérer la dimension formelle et sémantique du lien et la faculté qu'il a de pouvoir rompre la lecture cursive, horizontale, pour passer dans une autre dimension ;
intéresser les élèves au parcours du lecteur dans un système hypertextuel. Sous forme d'enquête, l'élève aurait pour tâche de retracer les parcours possibles de lecture lors d'une recherche par navigation pour se rendre d'un point (la question) à un autre (la réponse). La progression inter-nodale ainsi effectuée, à la manière d'une abeille poursuivant son butinage, ferait entrer dans la complexité du réseau et aborder l'opposition entre lecture linéaire et lecture réticulaire. Chaque nœud rencontré amenant à découvrir et à rendre compte d'un contexte documentaire particulier (titre, auteur, date, source, URL, pertinence, etc.), tel un voyageur du futur traversant autant de portes spatio-temporelles et devant décrire sur cartes postales les lieux qu'il traverse (nom, propriétaire, année, culture, localisation, intérêt touristique, etc.)
intéresser les élèves au nombre et à la nature des liens hypertextuels présents sur une page web. Ces liens peuvent être de différentes natures :
Chaque catégorie peut être quantifiée, de même qu'il peut être intéressant de catégoriser et de quantifier la nature du nœud d'où part ce lien et d'ainsi appréhender la notion de forme de l'information (image fixe, image animée, son, texte). Les critères guidant un tel inventaire pourraient très bien être laissés à l'initiative des élèves, par voie de tâtonnements et d'approximations guidés. Des types de page web distincts pourraient ainsi être testés afin d'établir d'éventuelles corrélations entre le nombre et la qualité des liens et la source ayant produit ces pages (commerciale, institutionnelle, scientifique, journalistique, etc.) ;
Le texte, l'internet, le web et le réseau apparaissent alors comme un tissu de significations, autant de médias saisis comme produits par une technique de tissage d'informations resserrées au moyen de nœuds et de liens établissant des correspondances entre elles et servant à contenir en ses rets les savoirs.
Lire, du bas lat. legere « rassembler, cueillir » (lat. lexis « mot », lexique), n'est-ce pas « assembler des lettres », puis des mots pour faire sens ?
Hypertexte, pour finir, a pour composé hyper, du gr. huper- « au-dessus, au-delà », générant ainsi l'idée d'un passage possible du texte vers un ailleurs du texte, dans les deux sens de verticalité (un approfondissement du texte) et d'horizontalité (un élargissement du texte), donnant ainsi une image assez exacte de sa fonction. De même, l'hyperlien est ce fil tendu au-dessus du texte, des textes ou bien courant sous l'étendue de l'interface, invisible par les humains mais visible par la machine, pour les relier entre eux et permettre le passage souterrain du lecteur.
Une carte étymologique rendrait assez bien compte, sémantiquement et métaphoriquement, de la complexité de ce « réseau lexical ». Ce passage par la langue, peu utilisé, constitue pour autant une entrée poétique dans la culture de l'information.
A la fois structurée et aérée, la fiche permet au lecteur une rapide représentation de ce qui est à l’œuvre.
Par ailleurs, tout un matériel didactique, allant de références théoriques pour le professeur (voir ci-dessous) au bilan de la séquence en passant par un exemple bienvenu de production d'élève accompagne cette fiche, constituant en quelque sorte son paratexte. Il permet au lecteur d'apprécier le cheminement de l'auteur et de contextualiser le travail réalisé, lequel se présente comme le résultat d'une expérimentation. Ces matériaux sont à reconstituer puisque disséminés sur plusieurs pages du site compte-tenu des différents moments d'expérimentation qu'a connu la séance. Heureusement, des hyperliens établissent les ponts nécessaires !
Au final, nous disposons là d'une séance dynamique, adaptable dès le collège, où les élèves enquêtent sur l'hypertexte tout en en produisant un. Preuve s'il en est besoin qu'il est possible de s'appuyer sur notre propre matière, l'information-documentation pour donner du sens aux apprentissages info-documentaires.
Ressources didactiques
Ressources scientifiques
Dimier Gildas. La navigation hypertextuelle. Cactus acide, 2013